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La loi n° 2014-640 du 20 juin 2014 relative à la réforme des procédures de révision et de réexamen d’une condamnation pénale définitive a modifié l’art 308 du code de procédure pénale. La décision du Conseil constitutionnel n° 2015-499 est venu abroger le dernier alinéa interdisant tout recours en cas d’inobservation de certaines dispositions.

Auparavant, l’art 308 CPP interdisait tout enregistrement sonore ou audiovisuel des débats et permettait au président de la cour d’assises d’ordonner l’enregistrement des débats en tout ou partie. Ce recueil de la parole de la victime et de la parole de la personne mise en cause favorisant l’appréciation des preuves. Il pouvait être utilisé jusqu’au prononcé de l’arrêt par la cour d’assises statuant en appel, par la Cour de cassation saisie d’une demande en révision ou, après cassation ou annulation de la demande en révision, par la juridiction de renvoi.

Rarement mise en œuvre par le président de la cour d’assises, seul le procès-verbal des débats du greffier retrace l’oralité des débats faisait foi. Le « donné acte » est le moyen de faire « acter » un fait, survenu durant l’audience, estimé comme contraire aux droits. Or, s’il n’est pas relevé d’office ou pris en compte par le président, il sera absent de la transcription. Par ailleurs, comme tout écrit, l’absence d’expression, de tonalité, modifie la perception des échanges.

Le procès est la parole de l’un contre la parole de l’autre face à la parole judiciaire. La norme procédurale met en scène ces paroles selon ses règles. En ce sens, le procès les organise, les déforme, les néglige, les oublie bref l’écrit laisse de côté l’expression, l’émotion qui se dégage des paroles de la partie à l’audience.

Pour pallier à ce manque, le législateur a modifié l’art 308 pour généraliser et rendre systématique l’enregistrement sonore des débats des cours d’assises sous le contrôle du président. L’objectif : pouvoir fournir à la cour de révision des éléments suffisants pour pouvoir apprécier si les éléments produits à l'appui de la demande de révision sont réellement nouveaux. L’Etat confère ainsi aux parties un droit à l’enregistrement sonore du débat par l’obtention des moindres détails du déroulement du procès.

Toutefois, cette volonté est court-circuitée par le manque de moyens des tribunaux et par l’impossibilité de toute forme de recours en annulation en cas d’inobservation de cette formalité comme le confirme le dernier alinéa de l’art 308 CPP « Les dispositions ci-dessus ne sont pas prescrites à peine de nullité de la procédure ».

La saisie du Conseil constitutionnel était prévisible. La Cour de cassation renvoya la question de la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de ladite disposition, par le biais de la procédure, instaurée par la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008, en application de l’art 61-1 C.

Les sages de la rue Montpensier déclarèrent les dispositions du dernier alinéa de l’art 308 du CPP contraire à la Constitution dans la décision du 20 novembre 2015 (n° 2015-499).

Pour cette déclaration d’inconstitutionnalité, le Conseil constitutionnel s’est fondé sur les art de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen que nous pouvons associer à l’art 6§1 de la CESDH.

Les art 1, 6 et 16 CEDH rendent les hommes libres et égaux en droit sans distinction. La loi doit s’inscrire sans distinction pour les protéger ou les punir. A défaut, la société est absente de toute démocratie et s’en réfère l’arbitraire de certains hommes.

Afin d’éviter de tomber dans cet interdit, le principe de la légalité exige une absence de contradiction au sein des normes. Conférer un droit sans en obtenir réparation en cas d’impossibilité de l’obtenir est contraire à l’égalité du citoyen devant la loi.

C’est pourquoi, par le biais de ces textes nationaux mais aussi internationaux, l’Etat garantit le droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif ainsi que le respect des droits de la défense qui implique le droit à un procès équitable et juste (art 6§1 CESDH). 

La déclaration d'inconstitutionnalité du dernier alinéa de l'art 308 CPP produira son effet d'abrogation qu'à partir du 1 septembre 2016. Jusque là, le Conseil constitutionnel juge que les arrêts de la cour d'assises jusqu'à cette date ne pouvaient être contestés sur le fondement de cette inconstitutionnalité.

 

Tag(s) : #Droit pénal
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