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Par deux arrêts rendus 23 janvier 2008 dont le pourvoi n° 06-44.197 (voir aussi n° 06-43.040), la chambre sociale, en formation plénière,  s’est prononcée sur les conditions dans lesquelles il peut être recouru aux contrats à durée déterminée prévus par l’article L. 1242-2, 3° (ancien article L. 122-1-1, 3°) du code du travail.

En l’espèce, des contrats à durée déterminée successifs sont conclus entre M X, en qualité de formateur-professeur, et une Association (AFPM devenue CFAI par la suite). Cette relation contractuelle débute le 14 octobre 1988 pour cesser 31 juillet 2002. A la suite de cette rupture, M X saisit la juridiction prud’homale pour obtenir la requalification de ces contrats en contrat à durée indéterminée.

A la suite de l’appel du jugement, un arrêt est rendu par la Cour d’appel de Lyon le 31 mai 2006. Les juges du fond requalifient l’ensemble des contrats à durée déterminée en un contrat unique à durée indéterminée pour absence du caractère temporaire de l’emploi de formateur pourvu pendant quatorze ans.

L’association se pourvoi en cassation. Son argument : dans les secteurs d’activités définis par décret ou convention ou accord collectif, dont l’enseignement, il est d’usage constant de ne pas recourir à un CDI en raison de la nature temporaire de cet emploi, avec le même salarié.

La Haute Cour rejette le pourvoi en se référant aux anciens articles L122-1, L122-1-1, L122-3-10 du code du travail mais aussi à l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en œuvre par la directive 1999/70/CE du 28 juin 1999.

Les juges du fond repris par les Hauts magistrats retiennent que si le recours au contrat à durée déterminée dit d’usage est de droit, sa succession doit être justifiée par des raisons objectives.

I-                 Le recours au contrat à durée déterminée dits d’usage

Un emploi doit être pourvu par un contrat. Le contrat à durée indéterminée est le contrat de droit commun (article 1221-2 du CT). En conséquence, le contrat à durée déterminée est l’exception d’où des interdictions. Par cet arrêt, la chambre sociale se prononce sur les conditions dans lesquelles il peut être recouru aux contrats à durée déterminée dits d’usage prévu par l’article L1242-2, 3° (ancien article L122-1-1, 3°).

A-     Interdiction de recours au CDD

Les articles L 1248-1 et suivants du code du travail prévoient des sanctions pénales ainsi que l’article 1254-5 du CT.

Les articles 1242-5 et suivants énoncent les prohibitions en matière de recours au CDD :

  • Dans les six mois suivant un licenciement pour motif économique

Ne sont visés que les postes concernés dans l’établissement. Deux exceptions : lorsque le contrat n’est pas susceptible de renouvellement et que sa durée n’excède pas 3 mois ; Lors de la survenance d’une commande exceptionnelle à l’exportation « dont l’importance nécessite la mise en œuvre de moyens quantitativement ou qualitativement exorbitants de ceux que l’entreprise utilise ordinairement » (consultation préalable du comité d’entreprise ou délégués du personnel à défaut).

  • En cas de grève (art L1242-6)
  • En cas de travaux particulièrement dangereux figurant sur une liste établie par voie règlementaire (art L 4154-1 et D 4154-1 CT).

Voir dérogation du directeur départemental du travail, art D 4154-2 à D 4154-6 du CT.

B-     La durée du CDD

En principe la durée maximale d’un CDD, renouvellement compris, est de 18 mois. Mais de nombreuses exceptions existent dont le contrat dit d’usage.

Contrat à terme précis :

3 mois : accroissement temporaire d’activité dans un établissement ayant procédé à un licenciement économique depuis moins de 6 mois

9 mois : Attente de l’entrée en service effective d’un salarié recruté en CDI ; Réalisation de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité

18 mois : accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ; Remplacement d’un salarié absent ou dont le contrat est suspendu ; Emploi à caractère saisonnier ou dans certains secteurs d’activités où il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois (liste art D 1242-1 du CT)

24 mois : Remplacement d’un salarié ayant définitivement quitté l’entreprise, lorsque la suppression ultérieure de son poste est décidée ; Survenance dans l’entreprise d’une commande exceptionnelle (voir A) ; Lorsque le contrat est exécuté à l’étranger

36 mois : CDD sénior (+ de 57 ans) inscrite depuis plus de 3 mois comme chercheur d’emploi ou bénéficiant d’une convention de reclassement personnalisé (durée de principe 18 mois, renouvelable sans excéder 36 mois)

3 ans (sans renouvellement) : CDD à objet défini, mission conclu exclusivement avec les ingénieurs et cadres si accord de branche étendu ou accord d’entreprise prévoyant cette possibilité.

Contrat à terme imprécis : L’article L 1242-7 CT : Pour remplacer un salarié absent ou contrat suspendu - Emplois à caractère saisonnier ou CDD dits d’usage.

En principe le CDD est renouvelable une fois pour une durée déterminée, sans dépasser les durées maximales. La succession de CDD avec un même salarié n’est possible que pour les emplois à caractère saisonnier ou CDD dits « d’usage ».

II-               La justification de la succession de CDD dits d’usage 

Pour les juges le recours à l'utilisation de contrats à durée déterminée successifs est justifié par des raisons objectives qui s'entendent de l'existence d'éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l'emploi.

A-     Par des raisons objectives

Les dispositions de l’article L. 1242-2, 3° (ancien article L. 122-1-1, 3°) du code du travail permettent de conclure un contrat à durée déterminée afin de pourvoir des emplois pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, il est « d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois ».

A la suite d’une série d’arrêts rendus le 26 nov 2003 par la chambre sociale, le recours au CDD de l’article L 1242-2, 3° était possible si l’on se trouvait dans l’un des secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, et que soit constatée, par une appréciation souveraine des juges du fond, l’existence dans ce secteur d’un usage constant permettant pour l’emploi concerné de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée. D’où l’absence du caractère temporaire de l’emploi, source d’insécurité juridique.

Suite à l’application de l’accord-cadre sur le contrat de travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999 et mis en œuvre par la directive 1999/70/CE, par la CJCE (voir arrêt Konstantinos Adeneler et autres du 4 juillet 2006), les juges du fond sont plus restrictifs.

La Directive en ses clauses impose la justification du CDD par des raisons objectives. Celles-ci s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

B-     Existence d’éléments concrets du caractère par nature temporaire de l’emploi

C’est pourquoi dans l’arrêt de rejet présent, la Cour de cassation confirme la décision de la cour d’appel en ces termes « attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que l'enseignement figurait dans les secteurs d'activité où il peut être recouru à des contrats à durée déterminée dits "d'usage", a constaté que M. X... avait occupé le même emploi de formateur - professeur d'éducation artistique, pendant quatorze années scolaires successives et que cet emploi n'avait pas un caractère temporaire ; qu'il en résulte que la conclusion de contrats à durée déterminée successifs n'était pas justifiée par des raisons objectives ».

L’utilisation de ces CDD dits d’usage ne saurait s’appliquer afin de pourvoir des emplois permanents dans les secteurs définis contrairement à l’ancienne jurisprudence.

Tag(s) : #Droit social
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