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La loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 est venue bouleverser la hierarchie des normes en droit du travail.

Elle pose le principe de la supplétivité des dispositions conventionnelles issues des accords collectifs de branche par rapport aux dispositions des accords collectifs d'entreprise, au niveau local.

Aujourd'hui, la loi Travail confirme cette primauté de l'accord collectif d'entreprise.

La question soulevée : l'apport de la loi Travail ?

Afin de nous éclairer nous aborderons dans un premier point les conditions de validité d'un accord d'entreprise pour ensuite étudier l'évolution souhaitée par l'exécutif.

I- L'ACCORD COLLECTIF D'ENTREPRISE : L'ACCORD LOCAL FACE A L'ACCORD NATIONAL

Tout d'abord, il est intéressant de différencier l'accord collectif d'entreprise et la convention collective de branche pour ensuite reconnaître la primeur à la première.

A- La distinction avec la convention collective

1- La Convention collective de branche

La Convention collective est signée par les représentants syndicaux des employeurs et des salariés au niveau d'une branche professionnelle.

Elle traite de l'ensemble des règles de travail et des droits collectifs des salariés dans le secteur concerné, art L 2221-2 CT.

Toutes les entreprises privées sont, en principe, concernées. Le code APE de l'entreprise permet de l'identifier. 

C'est pourquoi, en vertu de l'art R 2262-1 CT, l'employeur doit remettre au salarié, au moment de l'embauche, une notice d'information des textes conventionnels applicables dans l'entreprise. Par ailleurs, l'art R 3243-1 Ct impose à l'employeur de fournir un bulletin de paie comportant l'intitulé de la convention collective de branche applicable.

L'activité principale de l'entreprise est le critère essentiel d'application de la norme collective applicable.

2- L'accord collectif d'entreprise

Afin d'adapter les règles du code du travail aux spécificités et besoins "locaux" de l'entreprise, la négociation permet d'établir un accord d'entreprise.

L’art L 2232-12 ct subordonne la validité de l’accord d’entreprise :

  • A la signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages au premier tour des élections des titulaires du comité d’entreprise …, quel que soit le nombre de votants
  • A l’absence d’opposition, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l’accord, d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés, quel que soit le nombre de votants.

Et l’art L 2254-1 énonce que « lorsqu’un employeur est lié par les clauses d’une convention ou d’un accord, ces clauses s’appliquent aux contrats de travail conclus avec lui, sauf stipulations plus favorables ».

B- La primauté de l'accord collectif d'entreprise sur la convention collective

Le principe d'ordre public social qui veut qu'en cas de conflit de textes sur un même objet, une même cause, le texte le plus favorable au salarié doit être appliqué est remis en cause par la loi du 4 mai 2004.

1- Remise en cause de la hiérarchie des normes en droit du travail

Il convient d'ores et déjà de souligner que les conventions collectives ou les accords d'entreprise doivent s'accorder avec le droit du travail. 

Ces deux accords de branche et d'entreprise doivent, en principe, améliorer la situation des salariées par rapport à la loi.

Ainsi, l'art L 2251-1 prévoit que "Une convention ou un accord peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur. Ils ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public".

Toutefois, l'art L 2252-1 CT permet à l'accord de branche de prévoir des dispositions moins favorables que les conventions.

2- Irrespect légal du principe de faveur

En conséquence, depuis 2004, si le code de travail prévoit une majoration de 25 % des heures supplémentaires de la 36° h et ce jusqu'à la 43°, 50 % au-delà, un accord d'entreprise ou une convention de branche, peut prévoit qu'elles ne seront payées que 10 %, art L 3121-22 ct.

La loi sur le dialogue social (n° 2004-391) a commencé à mettre sur le même pied d'égalité, la convention nationale et l'accord d'entreprise pour ensuite favoriser la seconde :

  • Autonomie de l'accord d'entreprise
  • Principe de primauté de l'accord d'entreprise sur l'accord de niveau supérieur
  • Autorisation de déroger, même sans respect du principe de faveur, à une norme supérieure (CConst n° 2004-494 du 29/04/04).

II- LA CONSECRATION DE LA DOMINANCE DE L'ACCORD COLLECTIF D'ENTREPRISE 

Tout d'abord intéressons-nous aux conditions de validité du texte pour ensuite aborder la volonté de l'exécutif.

A- Les conditions de validité aujourd'hui

Comme souligné précédemment, les accords collectifs doivent être conformes à l'ordre public social pour être applicables.

1- Conformité à l'ordre public social

Dans sa décision du 4 février 2014 n° 12-35333, la Cour de cassation a rappelé que "Les conditions de validité d'un accord collectif sont d'ordre public; il en résulte qu'un accord collectif ne peut subordonner sa validité à des conditions de majorité différentes de celles prévues par la loi". Par conséquent, "Doit par conséquent être approuvée la décision de la cour d'appel qui a constaté qu'un accord collectif avait été signé par au moins un syndicat représentatif, conformément. aux prescriptions de l'article L. 2231-1 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, et en a déduit à bon droit qu'il était valable, et que la clause qui conditionnait la validité de certaines de ses dispositions relatives au salaire à l'accord unanime des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ne pouvait être invoqué par l'employeur pour se soustraire à l'application de l'accord".

La loi du 20 aout 2008 est venue poser une double condition subordonnant la validité de la conclusion des accords collectifs au sein de l'entreprise.

2- La double condition de validité de l'accord d'entreprise

Deux suppositions : présence ou absence d'instance représentative du personnel.

- Présence d'IRP

L'art 2232-12 Ct subordonne la validité d'un accord d'enterprise :

  • à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants
  • à la non opposition, dans un délai de 8 jours à compter de la date de notification de cet accord, de la part d'une ou plusieurs organisations de salariés ayant recueilli au moins la majorité des suffrages exprimés au premier tour des élections de titulaires au CE ou DUP, ou à défaut, des DP.

- Absence d'IRP

L'employeur peut organiser une consultation des salariés, après avoir consulté le ou les salariés mandaté (s) à cet effet.

B- Les conditions de validité demain

1- Signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives à 50 %

L'art 2232 Ct conditionnera la validité d'un accord d'entreprise (ou d'établissement) :

  • à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % (au lieu de 30 %) des suffrages exprimés, d'où un blocage possible.

Relevons un arrêt du 21 septembre 2017 de la chambre sociale de la Cour de cassation qui précise les conséquences de l'évolution de la représentativité syndicale :

Tout d'abord énonçons l'article produit qui a été modifié depuis avec la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

Article L2261-7 de la loi 789-2008 du 20 août 2008: Les organisations syndicales de salariés représentatives, signataires d'une convention ou d'un accord ou qui y ont adhéré conformément aux dispositions de l'article L. 2261-3, sont seules habilitées à signer, dans les conditions prévues au chapitre II du titre III, les avenants portant révision de cette convention ou de cet accord.

La Cour de cassation considère que toutes les organisations syndicales représentatives doivent être convoquées à la négociation de révision même si, au final, seules les organisations signataires de l'accord initial pourront signer l'avenant.. A défaut, l'accord de révision est nul (Cass soc 31 mai 2006 n° 04-14.060).

Pour autant, l’organisation syndicale de salariés qui, signataire d’un accord d’entreprise, n’est plus représentative pour la durée du cycle électoral au cours duquel la révision d’un accord d’entreprise est proposée, ne peut pas s’opposer à la négociation d’un tel accord (Cass soc 21 sept 2017 n° 15-25.531).

2- A défaut référendum à l'initiative de l'employeur et contournement des syndicats

Si cette condition n'est pas rempli et que l'accord a été signé par l'employeur et par des organisations syndicales représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés..., quel que soit le nombre de votants,

  • une ou plusieurs de ces organisations ayant recueilli plus de 30 % des suffrages peuvent indiquer qu'elles souhaitent une consultation des salariés visant à valider l'accord.
  • Si à l'issue d'un délai de huit jours à compter de cette demande, le pourcentage de 50 % mentionné précédemment n'est toujours pas atteint, cette consultation est organisée.

​Depuis 2004, il s'agit de donner, progressivement, la parole à l'entreprise qui devra se gérer par ces accords internes et non plus par un accord de branche. D'où un cas par cas qui génère progressivement une volonté d'effacer le syndicalisme. Il convient de reconnaître que celui-ci a permis des avancées depuis 1884.

Ce qui démontre que nous pouvons agir intelligemment, dans le dialogue et aucunement dans une opposition au détriment du travailleur. L'ancrage dans le temps confirme une évolution commune des employeurs et des travailleurs au sein même du syndicat.

De nos jours, doit-on après la destruction des parties en conformité avec la volonté de globaliser la politique et l'économie mondiale, détruire le syndicalisme ?

Par ailleurs, une organisation qui existe depuis si longtemps, 1896, tout en participant à la résistance, à l'oppression de l'autoritarisme, de la dictature,témoigne d'une vision réformiste. La supprimer voudrait dire que nous devons effacer notre patrimoine au nom de la liberté d'enrichir par les dividendes ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tag(s) : #Droit social
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